Crédit photo Arnaud Chatelard |
Abandonné, l’asile se murmure. L’herbe folle capitonne les cellules. L’extérieur est entré, il ne veut pas s’en sortir. Se plante et replante un jardin piétiné sans souliers. Les allées venues se sèment en dedans et se couvrent de pelouse.
Les yeux se ferment…
Lundi, jeudi, les épinards hachés ! La psychose a pris l’eau sous la pluie d’avril depuis mars des fous sans prendre de calmants. Les fenêtres sont tombées et les portes béantes. Elle germe à la folie, l’odeur de la verdure... des pousses poussent en tapis resserrés, traversent les couloirs, grimpent les escaliers et s’accrochent au plafond.
Les yeux se ferment…
Parfums d’hôpital… désinfectants à la serpillière, rôti bouilli, nettoyage à sec des blouses infirmières… Bruits de flacons caoutchoutés où pique la seringue, cachets qui s’échappent et cliquètent dans le siphon du carrelage… piétinements, battements, glissements, froissements, jeux de mains, tête à claques, claques à tête… douches froides qui se taisent lentement. Du vent dans la cervelle… une sauterelle rigole… l’air court longuement.
Les yeux se ferment…
Un cri... une voix… qui ne se répondent pas. Et planent les papillons.
Les yeux se ferment… Envolés les tablés, les givrés, les mal barrés de la tête, dans une brume chimique qui enveloppait leurs oreilles et s’attachait sous le cou… les pieds devant, les mains derrière, la camisole en bandoulière et la bouche plantée d’une pâquerette… par le petit train électrique… branchés aux électrodes et deux poignées de mains.
L’asile demeure, sans raison, à en devenir fou. Il a mangé le temps, s’est repeint en pré cru. Il s’est mis au vert, divague à l’âme, se prend pour un champ.
Les esprits dérangés ne se réveilleront pas, peu importe l’heure à laquelle on passera la tondeuse…
Et le lierre…