vendredi 1 septembre 2017

IDÉE


Un jour il faudra que je lui bricole un interrupteur... la nuit on ne la voit pas... parce qu'allumée elle doit être belle aussi... la lampe du grenier.

RÊVES D'ÉTÉ

Ils ont chanté toute la nuit sur la penderie de ma chambre, les fanions du 14 juillet pendus en guirlande. Projetés par le jeu de lumière du voisin. Un jeu de lumière projecteur qui balance 300 watts pas moins, un coup bleu, un coup blanc, un coup rouge, qui fête la prise de la Bastille, qui me bouffe le compteur et fait sauter mes plombs. Le voisin qui dit qu'il ne prend pas de pastilles qu'il préfère les joints. Celui d'en face qui gueule sur son ordinateur après minuit jusqu'à ce qu'il tombe, par forcément de sommeil, la fenêtre grande ouverte, la fumée qui s'échappe, le pécos raccourci qu'il décoche sur le toit de la voiture du voisin, l'autre. Sans viser, sans se lever, sans s'arrêter de gueuler. La bagnole du voisin d'à côté. Celle garée un peu sur le trottoir, un peu qui dépasse, qui dégouline d'huile noire qui dégueulasse le devant de la coiffeuse. Celui qui s'est fait sucré le permis par une sucrière à gros trous. Le voisin d'à côté qui a un gros nez plein le nez de choses saupoudrés. Et la mairie qui s'en fout. Vous savez ce que ça coûte de déplacer un lampadaire comme ça ? Le lampadaire de la rue, je lui ai flingué la lumière d'un coup de manche à balai dans son cul rebondi... elle éclairait à rayures mes rêves dans la nuit. Et prendre des trucs à m'endormir.

MATIN

Il y a l'autre, celle qui écoute la radio, le son à la portière. Qui hurle les chansons pour se réveiller. À 30 de 6 heures tous les matins qu'un dieu se fait chier à refaire. L'autre qui coud la rue de pair en impair d'un zigzag au fil imaginé, d'un filet de fumée de pot encrassé. Ça pue le bruit de la boite à craquer, le bruit du frein à main bandé débandé, le bruit de l'emmerdement, du redémarrage en côte... C'est la rue qui descend. Elle s'arrête en montant, elle s'arrête sans arrêt. Elle livre le journal, elle livre à domicile les vaches qui s'étranglent aux fils barbelés, qui préfèrent être mortes avant d'être tuées. L'autre, la livreuse dans les fentes tirelires, qui fourre les boites de papiers indécents, de papiers mal torchés, la livreuse du matin qui nous donne l'heure. Je dors le matin.

RUES

Il ne me fallut pas longtemps pour constater que le silence venait d'une autre rue. Cette rue était celle des dormeurs de nuit. L'absence de bruit y régnait comme dans une boite qu'on venait de vider. Il y avait paraît-il une rue des dormeurs de jour, elle était ennuyeusement sombre. La lumière ne s'y pointait qu'en catimini. Petit catimini et robe de chambre en couverture mauve. Le mauve passé et le couverture pelucheuse à la râpe. Et la rue des indisciplinés, alternativement estampillée de rais solaires blancs et de faisceaux jaunes de lampadaires gris. Un coup l'un, un coup l'autre, empilés jusqu'à plus soif. Je m'étais trompée de rue. Je ne sais exactement si c'était parce que je n'avais pas emprunté le bon couloir de délestage juste après l'intrusion du camion de livraison ou si... La pluie aiguisée tranchait la gouttière en rondelles irrégulières dans un cisaillement cru de disqueuse. Du 33 tours entortillé en 78 qui lui collait une frénésie crispante. Ma main à couper ! J'avais les paupières roulés en nems aux crevettes, des stores à ciel ouvert. Fallait que je les déroule si je voulais finir quelque chose... au moins ma nuit. Finis ta nuit ! Disait ma grand-mère... ou ton assiette ! Mais finis quelque chose ! J'ai pris mes affaires. Des chaussettes dans des bottes en caoutchouc. Le reste a suivi. Il ne faisait pas chaud. J'avais le crâne qui me démangeait dans le sens des aiguilles. J'ai regardé l'heure rouge sur fond. Dilatée. Elle battait... surtout le point entre les lettres. 
Je suis partie. 
La rue pour la trouver, c'était juste une question à ne pas se poser. Je crois. Mais si quelqu'un l'a vue... ça m'arrangerait.

DIMANCHE MATIN N'ARRÊTE PAS

 J'aurais aimé. Redemander. Me resservir et puis saucer, ça ne se fait pas. Reprendre une part de gâteau. En prendre jusqu'à ce qu'il n'y ait plus rien. Sans rien proposer. Sans rien partager. Rien que pour moi et m'en déborder. La cuillère de trop qui touche le fond qui racle le plat. Vider ce qui peut se vider et ce qui ne se vide pas. Et le goût de revenez-y et le goût de j'ai pas fini. Et en revenir et puis y revenir, j'en reviendrai pas et j'ai pas envie de revenir. Aller au loin jusqu'à faire un trou, tout au fond du trou et toucher le bout, ce qu'il y a derrière, ce qu'il y a après. Courir plus vite et me dépasser. C'est pas fini j'ai dit, il n'y a pas de fin. Ça recommencera et recommencer, tête la première, m'insatisfaire, ne plus être là, être à la fois d'après, celle qui me continuera. J'aurais dû commencer. Commencer une fois, et ne plus jamais, jamais m'arrêter. 
Les bottes de cent lieux dans la vitrine l'autre fois... j'aurais mieux fait de les acheter.